bac de français - théâtre

Cards (62)

  • Lagarce: '"je ne peux pas m'empêcher de considérer ce qui a eu lieu sur scène comme ayant déjà eu lieu, comme étant répété, comme ayant déjà été entendu"'
  • François Berreur (metteur en scène de JLFDM): '"les petites histoires des hommes sont aussi nos grandes histoires à tous"'
  • Hélène Kuntz: '"Les pièces de Lagarce sont le théâtre des hésitations de la parole, des non-dits, des accidents et des failles du langage"'
  • Raskine: '"Toutes les familles sont des volcans. Les noyaux familiaux les plus harmonieux et les plus soudés traversent des épreuves, des crispations, des douleurs, des silences, des non-dits, des secrets, des tensions, des conflits, des drames"'
  • Éléments pour l’introduction
    • écriture fondée sur une esthétique du ressassement et son oeuvre est souvent comparé à un palimpseste - motif, variation autour d’un thème traditionnel
    • Dramaturgie lagarcienne - le langage
  • Crises
    • La crise est, par essence, spectaculaire et il n’est pas étonnant qu’elle soit un matériau prisé des dramaturges depuis l'Antiquité. Puisqu’elle est rupture d’un équilibre, la crise recèle un potentiel scénique fort - la violence des émotions + transformation et un fort enjeu dramatique
    • Les tensions entre « crise personnelle » et « crise familiale » peuvent tenir à un éventuel décalage entre un sentiment d’appartenance à un ensemble (la famille) et l’envie d’acquérir une identité propre, de s’affirmer : l’affirmation de soi et la quête d’identité
  • Influence du théâtre
    • Préface - “véritable mythe contemporain de la vie familiale”
    • Hypotexte = le théâtre apparaît comme le lieu privilégié de l’expression de la violence des familles (que ce soit de manière tragique ou comique) par exemple de nombreuses “tragédies du sang” du théâtre antique comme l’Agamemnon d’Eschyle, l’Electre d’Euripide ou de Sophocle; les références mythiques (biblique) qu’il reprend et déplace par exemple le retour du fils prodigue ou bien la thématique des frères ennemis comme Abel et Caïn
  • Portée universelle par les personnages “comme tout le monde”, fragiles et désarmés face aux sentiments humains et à la mort
    • Voulu par Lagarce - “C’est une pièce sur la famille, le corps et sur l’enfance. GLUPS” dans son journal avec humour
    • Pas de prénom au personnage de la mère
  • Mêlent l’intime et l’universel par les phrases au présent de vérité générale

    • Suzanne (I,3) « il y a des gens qui passent toute leur existence là où ils sont nés »
    • Antoine (I, 11) « les gens qui ne disent jamais rien, on croît juste qu’il veulent entendre »
  • Le langage est vu comme une arme
    • La violence verbale qui bloquent la prise de parole “ta gueule Suzanne”
    • Menaces “tu me touches je te tue”
    • Les reproches explicites comme Antoine (II,3) “lorsque tu nous quitteras encore, que tu me laisseras”
    • “D’une pierre deux coups” interprété comme une agression
  • Des tensions sociales liées au langage

    • Louis a un « don », une « qualité » et est ainsi un « homme habile » d’après Suzanne (I,3)
    • le langage est une qualité « pour les autres » puisqu’il les « juges pas dignes »
    • au contraire le reste de la famille se sent obligé de constamment se rectifier (épanorthose)
  • Des tensions sociales liées au travail
    • Louis à un « métier » tandis que Antoine à un « travail » - intellectuel vs. manuel / plaisir vs. nécessité 
    • Antoine travaille dans une « petite usine d’outillage » fait des « petites opérations » et vit dans une « petite maison, pavillon » 
    • Il dit à Louis « Tout n’est pas exceptionnel dans ta vie, dans ta petite vie, c’est une petite vie aussi, je ne dois pas avoir peur de ça » (I, 11)
  • Des tensions sociales liées à l’espace
    • La famille ne voyage jamais et est restée dans les alentours alors que Louis voyage
    • En particulier, Suzanne (I, 3) «j’habite toujours avec elle» et Louis (I, 11) « vous semblez toujours vouloir croire que j’habite à des milliers, centaines, milliers de kilomètres. »
  • Des tensions sociales liées aux objets
    • Suzanne (I, 3) « Toutes ces choses m’appartiennent »
    • Le père(I, 4) « c’était une voiture, il avait travaillé et elle était à lui, c’était la sienne, il n’en était pas peu fier. »
    • Au contraire le seul objet avec lequel Louis est associé est des journaux et il n’a même pas de voiture
  • Importance de la parole - dramaturgie lagarcienne
    • plus de 200x le verbe « dire » et 100x les verbes « parler », « raconter », « répondre »
    • les récits substituent l’action jusqu'à l’épilogue où il met un terme à l’histoire 
  • La difficulté de communiquer, la tragédie du langage incapable de dire
    • paradoxalement, 1/4 des phrases contenant le mot « dire » sont à la forme négative, avec notamment l’adverbe négatif « rien »
    • l’intermède est un chassé croisé chorégraphique révélant l’impossibilité d’être tous ensemble dans un même lieu et de bien s’entendre 
    • les monologues sont ainsi les seuls moments où Louis peut-être lui même
  • Les silences, la dramaturgie de l'ellipse
    • Les ellipses et les topos du « secret de famille » comme Antoine à Louis « Ne commence pas. -Quoi?- Tu sais »
    • Les non-dits sont le seul choix possible - personne n’est en position d’écouter Louis.
    • Révèle la solitude irréductible de l’être humain “Si tu avais mal, tu ne le dirais pas”
  • Puissance de la parole
    • Révèle les crises internes par les monologues
    • Antoine prends conscience de certains mécanisme en parlant comme Louis se laissant battre “j’y pense à l’instant”
  • Un conflit entre réalité et illusion
    • Si l’on ne peut pas communiquer alors on triche, on joue un rôle
    • Louis laisse voir une certaine image de lui « c’était tellement faux, je faisais juste mine de » et « comme si tu voulais, de cette manière, toujours paraître être en vacances »
    • le seul moyen de s’en sortir? la mère encourage « à leur tour enfin des tricheurs à part entière »
    • « me donner et donner aux autres une dernière fois l’illusion d’être responsable de moi-même et d’être »
  • Le refuge/la fuite dans l’imagination
    • Mère (I,8) « toujours elle imagine et ne sait rien de la réalité » - Suzanne (I,1) « Comme ça que je l’imagine »
    • De même pour Louis, retour rêvé, fantasmé ? La mise en scène de François Berreur, par son choix de décor « permet d'accentuer la dimension rêvée de la pièce. Cette visite à la famille, Louis l'a rêvée, il la met en scène et nous la donne à voir à nous, le public »
  • L’échec de l’intrigue principale
    • L'aveu annoncé dans le prologue, le sujet principal de la pièce « dire ma mort prochaine » ne se fera pas
    • Pas de réelle progression dramatique, pas de dénouement à proprement parler : dès la scène 1 de la partie II, Louis annonce qu'il n'a pas parlé, ce qui est confirmé à l'épilogue avec ce cri qui n'est pas poussé
    • On peut aussi analyser le titre de la pièce: « la fin du monde » annonce une catastrophe, aussitôt nuancée par l'adverbe « juste », comme pur annuler, annihiler l'effet spectaculaire et dramatique de la pièce
    • Sur le plan chronologique et de l'intrigue : pièce qui donne l'impression de ne pas avancer, Vinaver appelle cela une « pièce-paysage » (à l'inverse: une « pièce-machine » repose sur des rebondissements, des surprises, des actions qui s'enchaînent
  • Une structure décousue= une esthétique du disjoint
    • Lagarce lui-même l'écrit dans son journal « une sorte de succession de textes » « une série de monologues mis bout à bout »; les scènes s'enchaînent sans causalité, lien logique ni temporel.
    • On passe sans lien des dialogues, à des monologues et des quasi-monologues (sc 3,6,8 ;11, 3) qui interrompent le déroulement de l'action principal
    • L'intermède semble laisser l'action en suspens. 9 scènes très courtes qui semblent en décalage avec ce qui précède
  • Une dramaturgie rétrospective
    • prologue « retourner les voir/revenir sur mes pas/aller sur mes traces »
    • En fait, l'action principale = un bilan de vie, donc forcément cela n'implique pas une action éclatante
    • Le tps sur scène est envahi par un mouvement narratif et rétrospectif, une remémoration du passé qui freine l'événement et empêche l'action
  • Une temporalité floue
    • Un temps subjectif, que chacun vit intimement - didascalie initiale « un dimanche ou bien une année entière » 
    • volonté d'étirer le temps, de retarder les événements : Suzanne surtout (alors qu'Antoine, lui, veut accélérer le départ de Louis en proposant de la raccompagner)
    • prologue « plus tard l'année d'après, j'allais mourir » et épilogue « après, je meurs quelques mois plus tard. Une année tout au plus » (Louis parle en étant mort ?)
  • Identité et rôle des personnages fixés
    • de manière tragique et immuable, souvent attribuée par les autres
    • les très nombreuses occurrences des adverbes « jamais » et « toujours »
    • Suzanne (I, 1) « il ne change pas » (x3), tu ne changes pas » 
    • Antoine « vous dites que je suis brutal, mais je ne le suis pas et ne l'ai jamais été »
    • importance de la transmission (les noms)
    • Louis a voulu rompre avec cette transmission en étant différent - la mère (I,8) « ce n'est pas nous qui t'avons appris cette façon si habile et détestable d'être paisible en toutes circonstances»
  • Immobilités des habitudes et la sédentarité
    • par exemple, l’habitude/la tradition des dimanches « toujours et systématique » « comme un rite » 
    • la pièce, ainsi que leurs vies se passe toujours au même endroit « dans la maison de la mère et de Suzanne » d’après la didascalie initiale
  • Les désirs contradictoires face au changement

    • A aimerait que le regard sur lui change car injuste « ça va encore être de ma faute ce ne peut pas toujours être comme ça »
    • mais le changement est soit impossible, soit mal vu - A (II, 2)« tout est réglé mais elle veut à nouveau tout changer»
    • tiraillé entre ce que l'on veut faire, et ce qu’on fait : verbe « vouloir », souvent au conditionnel « voudrait »
    • 8 « Antoine voudrait plus de liberté (...) il voudrait pouvoir vivre autrement » « Suzanne voudrait partir, aller loin et vivre une autre vie(...) dans un autre monde »
  • Crise familiale, absence de liberté à cause des uns et des autres

    • Antoine (II,3) « lorsque tu es parti, lorsque tu nous as quitté, lorsque tu nous abandonnas (...)je dus « rester là, comme un benêt, à t'attendre »
    • La vie de famille est racontée du point de vue du rapport de force, du jeu d’alliance par le champ lexical qui parcourt l’œuvre : celui de la faute, des reproches, de l’accusation « je devais me défendre, on ne peut pas m’accuser » « être deux contre celui-là » « faire front contre moi » (11) et une opposition entre « je » et « vous », le clan familial
  • La puissance de la résignation
    • Suzanne (I,3) « peut-être que ma vie sera toujours ainsi » « c'est peut-étre mon sort, ce mot-là, ma destinée, cette vie »
    • Catherine (I,2) « après un certain âge, sauf exception, on abandonne, on renonce»
    • La mère, elle, n'aime pas le changement vu le plaisir qu'elle prend à raconter le passé
    • les actions semblent déjà décidées - Mère (I, 8) « je sais comment cela se passera et s'est toujours passé »
  • L’immobilité du langage
    • le langage est marqué par les retours; impression de tourner en rond, de cercle
    • Retour des phrases sur elles-mêmes, stagnation, reformulation, aphérèses, répétitions, épanorthoses, Ou logorrhées qui semblent engluer l'action
  • Les crises
    • Rupture d'un équilibre, la crise recèle un potentiel scénique fort: comment rendre compte de la violence des émotions sur scène ?
    • Les crises explosives : par les mots, les gestes, les actions sur scène - pleurs, insulte, scène 9, bras d'honneur, menace II,2 (« tu me touches, je te tue )
    • Les conflits, suggérés et non montrés ouvertement, sont moins spectaculaires mais pas moins forts ni émouvants : la crise entre les frères est ancienne : (4 et 11) les bagarres entre frères remontent à l’enfance
  • La transformation du personnage ainsi que son rapport aux autres

    • Étape au sein d'une vie (« crise d'adolescence, de la quarantaine »), la crise marque une transformation du personnage ainsi que de son rapport aux autres. Cela se voit dans les alliances, la répartition de la parole (qui parle le plus? qui pose des questions?)
  • L’affirmation de soi et la quête d’identité
    • Les tensions entre « crise personnelle » et « crise familiale » peuvent tenir à un éventuel hiatus (= décalage) entre un sentiment d'appartenance à un ensemble (la famille) et l'envie d'acquérir une identité propre. L'affirmation de soi et la quête d'identité sont donc liées au thème de la crise. La famille aime, sécurise mais parfois étouffé
    • Ancrée dans une temporalité, elle distingue un avant d'un après. Elle comporte donc au théâtre un fort enjeu dramatique (au sens de « qui fait avancer l'action »), parfois un coup de théâtre
  • La crise diluée
    • Le huis clos renforce l'immobilité et montre que tout se passe au niveau de l'intime
    • Intermède, sc 4, S: « Rien de bien tragique non plus, pas de drames, des trahisons »
    • Un tragique du quotidien, des micro crises ou d'une crise existentielle qui parle à chacun, là où on ne s'y attendait pas forcément: complexe d'infériorité, social, rôles, et pas forcément spectaculaires mais se situe dans les détails des mots, ou le décor
    • cri retenu à la toute fin de la pièce + le rôle des silences ou des paroles qui ne libèrent pas (ex: S sc 3 finit par « tout va bien » ce qui est faux.)
  • Influence sur le spectateur

    • la crise a une influence aussi sur le spectateur, lui aussi amené - de façon cathartique- à s'interroger sur ce qui le relie à ces autres 
    • Dimension poétique et charge émotionnelle forte dans les mots + les monologues de Louis (le prologue, la scène 10...)
    • Novembre 1983, Lagarce assiste au spectace Par les villages de Peter Handke « je suis sorti de là broyé, rompu (...)mon incapacité à parler de et à mon frère et ma soeur. Le pouvoir des mots (...c'est entré dans mon esprit et ça va y faire son chemin. » Effet miroir, identification
  • Démesure tragique dans la lutte intérieure et vaine pour changer les choses

    • Le tragique implique aussi la démesure = l'hybris
    • forme de fatalité tragique et existentielle, liés au choix, à la liberté : a-t-on le choix ? à petite échelle : Suzanne aimerait repousser le départ de Louis, changer le cours des choses et propose des solutions « mieux encore » « mieux encore ...»
  • Crise
    Conflit intérieur et existentiel entre la fatalité et le désir démesuré de lutter contre le destin
  • Fatalité
    Désir démesuré (Thybris) de lutter contre le destin, la mort
  • Personnage: '« courir devant la Mort/prétendre la semer/qu'elle ne puisse jamais m'atteindre ou qu'elle ne sache jamais où me trouver »'